par Blandine Poidevin, avocat
Depuis la loi du 3 janvier 2001 n° 2001-1, le Gouvernement est autorisé à transposer par voie d’ordonnance les directives Communautaires.
C’est ainsi que par ordonnance du 23 août 2001 (Ordonnance n° 2001-741 portant transposition des directives Communautaires et adaptation du droit) a été transposée partiellement la directive du 20 mai 1997 n° 97/7/CE concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance, parmi 6 autres directives.
Les modifications en droit interne sont substantielles pour les exploitants de site de commerce électronique.
Le chapitre II de cette ordonnance est consacré aux « contrats conclus à distance », ce qui correspond au vocable générique regroupant l’e-business et les autres moyens de vente hors présence physique (vente par correspondance, par téléphone, par minitel…).
Le nouvel article L.121-16 du Code de la Consommation applique aux services en ligne le même régime juridique de la vente à distance qui ne concernait jusqu’alors que la vente de biens.
Cette nouveauté obligera toutes les sociétés de services proposant une offre au travers de leur site à se conformer aux obligations de la vente à distance.
A ce titre, le droit de rétractation s’appliquera aux services en ligne. Le délai de rétractation de sept jours francs (ou droit de retour) qui commence à courir à la livraison des biens, se compte à partir de l’acceptation de l’offre pour les prestations de services (article L.121-20 du Code de la Consommation).
Le site de commerce électronique correspondant à une offre de conclure un contrat, cette offre doit au minimum inclure les éléments suivants :
l’identification du vendeur,
les frais de livraison,
les modalités de paiement,
les modalités de livraison ou d’exécution,
l’existence du droit de rétractation,
la durée de validité de l’offre,
le coût de l’utilisation de la technique de communication à distance s’il est supérieur au tarif de base,
la durée minimale du contrat.
Si l’on peut considérer que la majorité des sites respectaient d’ores et déjà cette obligation d’information, il père maintenant une obligation générale d’information d’une « manière claire et compréhensible » et « sans équivoque » (article L.121-18 du Code de la Consommation).
Innovation majeure, le nouvel article L.121-19 du Code de la Consommation exige du professionnel s’adressant au consommateur qu’il confirme « par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition en temps utiles et au plus tard au moment de la livraison » les informations de l’offre ainsi que les conditions et modalités d’exercice du droit de rétractation, le service après-vente et/ou les garanties et conditions de résiliation.
Ainsi, une étape nouvelle de confirmation de l’achat doit être mise en place dans la gestion de l’acte d’achat sur le site (article L.121-19 du Code de la Consommation).
Le risque est loin d’être négligeable pour le vendeur puisque le non-respect de cette obligation de confirmation aura pour effet de porter le droit de rétractation de sept jours à trois mois.
Si la confirmation intervient pendant ce délai de trois mois, le délai de rétractation court alors à partir de la réception de cette confirmation (article L.121-20 du Code de la Consommation). On peut vraisemblablement considérer que cette confirmation aura un effet non négligeable en terme de preuve ultérieure de l’achat.
Le professionnel est tenu de rembourser le consommateur qui exerce son droit de retour sans délai et au plus tard sous trente jours à partir de la demande.
A défaut, le consommateur peut réclamer des intérêts au taux d’intérêt légal (article L.121-20-1 du Code de la Consommation).
Le même délai de remboursement s’applique en cas d’indisponibilité du produit (article L.121-20-3 du Code de la Consommation).
Cette ordonnance ne s’applique pas aux services financiers (article L.121-17 1° du Code de la Consommation).
Le droit de rétractation ne s’applique pas :
aux biens et services dont le prix est soumis aux fluctuations du marché,
à la fourniture de services dont l’exécution a commencé, avec l’accord du consommateur (1) , avant la fin du délai de sept jours francs ;
à la fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés, ou qui, du fait de leur nature, ne peuvent être réexpédiés ou sont susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement. Sont ici évoqués les produits confectionnés selon les spécifications personnelles marquées du consommateur (exemple : ordinateur configuré spécialement, volet taillé pour une fenêtre non standard), les produits alimentaires…
les logiciels, enregistrements audio et vidéo descellés,
les journaux, périodiques ou magazines,
les services de paris ou de loteries autorisés,
(article L.121-20-2 du Code de la Consommation)
L’article L.121-20-3 dispose que le professionnel doit exécuter la commande sous trente jours à compter du lendemain de la commande.
Outre le délai de remboursement (voir supra), le professionnel peut substituer un bien ou un service « d’une qualité ou d’un prix équivalents » s’il s’en est réservé la possibilité.
Si le consommateur exerce alors son droit de retour, les frais de réexpédition sont à la charge du professionnel et le consommateur doit en être informé (article L.121-20-4 du Code de la Consommation).
Si le contrat ou les conditions générales de vente prévoient l’application de la loi d’Etat non membre de la Communauté Européenne, le juge est tenu d’appliquer au contrat les dispositions plus favorables au consommateur du lieu de son domicile (article L.121-20-6 du Code de la Consommation).
Il importe de respecter au plus tôt cette nouvelle réglementation.
Les Associations de Consommateurs peuvent notamment agir devant les juridictions civile par une « action en cessation d’agissements illicites » afin de faire cesser ou interdire tout agissement illicite.
« Le juge peut à ce titre ordonner le cas échéant sous astreinte la suppression d’une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné au consommateur » (article L.421-6 du Code de la Consommation).
La vigilance s’impose donc au professionnel.
Notons par ailleurs que cette ordonnance comporte d’autres dispositions relatives à la publicité comparative, aux clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs et à l’alimentation humaine et animale.
Blandine Poidevin, avocat
bpoidevin@jurisexpert.net
(1) La charge de la preuve pèsera sur le professionnel