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Comment les internautes vivent et vivront avec internet ? 3


Article paru le : 13 janvier 2003

Que pouvons-nous apprendre de notre expérience Internet ? (par Olivier Creusy, Co-fondateur d’Epoc Dynamiques)

L’utopie est enthousiaste

Vue de l’intérieur, la dynamique de la nouvelle économie révèle avant tout une envie d’inventer de nouvelles entreprises et de nouvelles méthodes. C’est le révélateur d’une ressource d’énergie et d’enthousiasme, rassurante sur notre capacité à prendre l’initiative pour maîtriser ce qui déterminera notre vie demain. Si les résultats à court terme sont mitigés, le potentiel demeure. Dans un contexte d’incertitude, c’est important.

L’énergie dépensée traduit également une attente plus générale d’une autre façon de vivre l’entreprise. Oui, il y a une part d’utopie dans une conception des relations dans le travail qui soit moins figée et plus ouverte à la responsabilisation de chacun : mais NON, rien ne changera si nous n’acceptons pas le risque de l’expérience. Nous savons maintenant que la technologie aide à diffuser de l’information et à travailler plus vite, mais pas nécessairement à mieux se comprendre : la force des nouvelles entreprises c’est de mettre chacun au pied du mur : on ne peut pas se cacher derrière les certitudes et les habitudes.

Nous y apprenons que le changement dépend beaucoup plus de notre sincérité et de notre volonté individuelles, que du contexte ou de pseudo concepts de management. La nouvelle économie ne crée pas de solution, mais nous offre la possibilité d’être différents. La vraie difficulté serait-elle là ?

L’enthousiasme n’empêche pas la lucidité

Est-ce que l’enthousiasme et la lucidité sont compatibles ? ou est-ce que le premier ne se dissout pas dans le second ? L’enthousiasme de l’inventeur a besoin de sa part d’excès : le créateur est souvent incompris, mais comment une hallucination devient-elle collective ?

Croire en quelque chose, et précisément dans un projet d’entreprise innovant, ne doit pas empêcher d’être lucide sur les difficultés qui se présentent et les moyens qu’il faudra mettre en œuvre pour les contourner. Dans la vie économique, il est plus sage de croire dans les moyens que l’on met en œuvre après les avoir évalués sans complaisance, plutôt que dans le discours conquérant et survolté d’un leader condamné au charisme malgré lui.

Nous apprenons que le plus difficile, c’est de parler de l’incertain, de partager ses interrogations sur le choix de la marche à suivre. Nous avons eu la preuve que l’auto persuasion et la manipulation de la pensée positive n’étaient pas des garanties de succès. N’est-ce pas alors le moment, pour le management, d’inventer une nouvelle transparence : la vraie solidarité ne se construit dans le partage d’illusions, mais plutôt dans celui de l’incertitude qui aboutit à la conviction de travailler ensemble sur les priorités. C’est plus efficace et plus honnête.

La lucidité demande da la méthode

Le point commun des innovations, c’est de proposer une rupture dans nos comportements habituels. Leur plus petit dénominateur commun, c’est d’être inattendues. C’est tout, et ce n’est souvent pas suffisant pour faire une révolution. Plus ce caractère inattendu est fort, plus il provoque des réactions contrastées, de l’acceptation sans réserve au rejet définitif. Lorsque l’on invente le code barre détachable sur les packs d’eau, c’est un peu inattendu et très astucieux : un petit plus qui facilité le quotidien, et aura toutes les chances de faire l’unanimité.

Le développement d’internet lui, est très inattendu, à la fois par sa puissance, en ayant le potentiel de bouleverser la communication et les échanges à travers le monde, mais aussi parce que le sujet est lui-même éloigné des préoccupations de la plupart de nos concitoyens-consommateurs. Les opinions et les comportements sont alors d’une extrême diversité et vont jusqu’à s’opposer, davantage sous l’effet du choc, inattendu, que sous celui d’une conscience claire de ses conséquences.

Rester lucide, c’est, avant de polémiquer, admettre que l’on ne comprend rien et commencer à se poser des questions. Ici moins qu’ailleurs, la démarche marketing ne pourra apporter de solution avant d’avoir posé le problème.

La méthode demande du réalisme

L’expérience internet nous apprend également beaucoup sur la dynamique et l’inertie collective d’un marché. L’innovation ne fait pas le bonheur, et plus le discours marketing fait semblant d’y croire, plus les consommateurs sont lucides.

Consommer, c’est un acte individuel dans un environnement collectif : à un moment donné, l’une ou l’autre dimension l’emporte. Chacun consommateur a tendance à devenir plus complexe parce que plus libre et autonome dans sa relation avec la consommation, les contours des cibles sont plus flous.

La proposition internet arrive dans un contexte où l’argument de la nouveauté de suffit pas : il faut apprendre à dire simplement le sens qu’elle peut avoir et assumer la charge de la preuve. La difficulté vient de ce que nous travaillons sur une réalité hybride, à la fois concrète et comportementale. Internet propose des produits ou des services dont on attend qualité et fiabilité ( je fais mes courses sur une site supermarché online, je veux être livré vite, sans erreur et sans retard ).

Le développeur du site et l’internaute sont par ailleurs conscients de la dimension expérimentale de leur relation : l’entreprise cherche à connaître comment son site est perçu et utilisé, cherche à savoir qui sont ses clients et leurs motivations.

Parallèlement, l’internaute teste le site et éventuellement son prolongement dans la vie réelle ( commander c’est bien, être livré c’est encore mieux ), en même temps qu’il définit consciemment et inconsciemment la place qu’il va donner à internet dans sa vie personnelle. Autrement dit, tous les paramètres de l’expérience variant en permanence, l’analyse est acrobatique

Nous apprenons alors que les comportements du consommateur/citoyen, dans la réalité et sur internet sont imbriqués, et instables. Puisque les deux univers communiquent, le marketing doit concentrer son attention sur les dynamiques qui font passer de l’un à l’autre. Plus que deux réalités, nous avons à maîtriser une réalité en extension permanente.

Mais le réalisme n’empêche pas l’enthousiasme. Traquer le sens de nos relations quotidiennes avec les nouvelles technologies, et chercher à faire émerger de la confusion une image un peu plus précise de notre proche futur, est passionnant. Ce sera le sujet de notre prochain épisode.

Olivier Creusy

Co-fondateur d’Epoc Dynamiques

Conseil en efficacité marketing et commerciale